Docu-bio
3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s)

JOURNAL DE FRANCE

Claudine Nougaret & Raymond Depardon (France 2012)

Les citoyens de France et les habitants d’ailleurs

100 min.
13 juin 2012
JOURNAL DE FRANCE

On le sait depuis longtemps et on en a encore aujourd’hui une emballante confirmation rien de ce qui est humain n’est étranger à Raymond Depardon.

Ce qui est unique chez ce septuagénaire toujours « on the road » ce n’est pas son souci depuis plus de 50 ans de prendre le pouls de la planète (*) ni sa technique faite de simplicité et de disponibilité pour en mesurer les soubresauts mais son attention à l’autre même dans les situations les plus périlleuses.

Attention qu’il exprime avec acuité, intelligence et recherche d’équilibre entre authenticité (refus obstiné du pittoresque ou de la pêche à l’émotion), respect du sujet observé et envie de porter sur notre époque un regard principalement scrutateur, accessoirement dénonciateur.

Dans ce « Journal de France » tel Ulysse revenant à Ithaque après de longs voyages, Raymond Depardon retrouve la France, la beauté de ses paysages, la diversité de ses villages et la bonhommie de ses habitants.

Retrouve et redécouvre un pays, le sien et en même temps renoue, avec une œuvre, la sienne, dont il a chargé Claudine Nougaret, son ingénieure de son, productrice et compagne de vie depuis 20 ans, d’extraire des inédits de ses films les plus emblématiques – « Profils paysans », « Afrique, comment ça va avec la douleur ? », « Flagrants délits » …

Il y a dans ce périple hexagonal - trépied, Leica avec rideau noir, chambre de développement nichée dans une fourgonnette blanche, lourde sacoche à l’épaule et bonnet de laine vissé sur le crâne – quelque chose d’original et de traditionnel.

Qui rappelle par ses engagements pédagogiques à comprendre le fonctionnement d’un pays « Le tour de la France par deux enfants », ce grand classique des leçons de choses que G.Bruno proposait aux élèves de l’entre-deux-guerres (1870 et 1914).

La matière ne serait rien sans la manière de la mettre en valeur. De donner cette impression qu’elle est fixée à la fois dans le présent qui raconte et intemporelle des archives qui la sauvegardent.

Belle leçon de cinéma par son crédo que « l’image ne doit pas en rajouter » ce dernier film de Depardon est aussi un magnifique hommage aux hommes et aux femmes qui font un pays.

S’il devait être synthétisé en deux mots, ceux de confiance (dans les individus filmés), de responsabilité (du réalisateur à ne pas passer à côté de son sujet) feraient l’affaire.

Deux mots pour un explorateur qui, attention au réel, sensibilité et patience en bandoulière, parvient à portraitiser bien plus que l’enveloppe physique de ce qu’il donne à voir.

Raison pour laquelle sans doute François Hollande l’a choisi pour symboliser la normalité dont il a fait, durant sa campagne électorale, son cheval de bataille.

A chacun de se demander si c’est une photo adaptée à la mission présidentielle. (mca)

 (*) photographe durant la guerre d’ Algérie, cinéaste-documentariste pour relater la séquestration de Françoise Claustre, réalisateur-témoin de conditions de vie comme celles du ghetto de Soweto ou des résidents de l’asile psychiatrique de San Clemente près de Venise …