Adaptation d’un livre
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JOUEUSE

Caroline Botaro (Distribution : Cinéart)

Sandrine Bonnaire, Kevin Kline, Francis Renaud,…

97 min.
19 août 2009
JOUEUSE

Tout commence derrière un voile dissimulant un monde où la femme joue aux échecs, bat l’homme, a le contrôle d’elle-même et maîtrise son environnement. Cette américaine polyglotte va inspirer Hélène dans sa recherche d’épanouissement. Par les échecs, elle va trouver une porte de sortie à sa double vie de femme de ménage/femme au foyer. Cette échappée intellectuelle devient une manière de s’élever au dessus des « qu’en-dira-t-on » et des préjugés qui pourrissent la vie des femmes.

Caroline Bottaro dénonce. Elle dénonce les hommes qui encore bien trop souvent considèrent les femmes comme leur mère et objet sexuel, qui se « servent » sexuellement dès que bon leur semblent et se foutent pas mal de ce qu’elles pensent. Peu à l’écoute, Ange, le mari d’Hélène incapable de se cuire un œuf, ne comprend pas la nouvelle passion de sa femme qu’il associe immédiatement à de l’adultère.

Très beau propos, bien traité par une mise en scène qui tantôt donne à voir, tantôt enferme, selon les humeurs émotionnelles de la protagoniste. Le magnifique paysage de Corse se déploie au même rythme que les charmes de la jeune femme. Mais ils se referment aussitôt, réduisant de nouveau la personne qu’elle est à une mère, une épouse. Ce va-et-vient entre l’hôtel, sa cuisine et la maison de campagne de son sauveur solitaire symbolise bien l’entre-deux dans lequel se trouve la femme actuelle, toujours piégée par la tradition mais avec une volonté de devenir, et surtout d’être considérée, comme un être à part entière.

Pourtant, les métaphores ainsi multipliées alourdissent le propos du film, qui risque de se voir cataloguer de manifeste féministe parmi tant d’autres, plutôt que comme un postulat contre la vie toute tracée des femmes.

Dommage, le film de Caroline Bottaro est beaucoup trop bavard à de nombreux niveaux. La référence à Martin Eden est une chose mais voilà sa présence expliquée par la fille « nouvelle génération » d’Hélène. « Mais oui maman, il avait raison de vouloir devenir écrivain, il en est devenu meilleur », ce à quoi Hélène répond « A quoi ça sert d’être meilleur quand on en fait rien ? ». Dialogues encombrants qui ne font qu’alourdir la symbolique facile du film. Le Dr. Kröger, quant à lui, souligne la constante recherche de sécurité chez la femme, qui a peur de prendre des risques et d’affronter sa propre vie. Les échecs deviennent alors la métaphore des risques nécessaires à la vie, surtout à celle des femmes.

Le propos s’enlise, derrière une accumulation de symboles un peu lourds et qui manquent d’originalité. Cependant, le jeu de Sandrine Bonnaire touche le spectateur, et le sujet tombe à pic dans une société où la femme tournée vers le monde libre est toujours contenue par des barrières, celles d’une tradition qui la comprime encore, comme le suggère la dernière image.

Un drame psychologique comme font si bien les français, dommage que les erreurs se répètent.

(Maud Ceuterick)