Drame familial
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JE M’APPELLE ELISABETH

Jean-Pierre Ameris (France 2006 - distributeur : les Films de l'Elysée)

Alba Gaïa Kraghede Bellugi Stephane Freiss, Maria de Medeiros, Yolande Moreau, Benjamin Ramon

110 min.
3 janvier 2007
JE M'APPELLE ELISABETH

Il y a entre la jeune Betty, l’héroïne de « Je m’appelle Elisabeth » et Woody Allen un lien. Un de ces liens fondateurs des personnalités sensibles, imaginatives et anxieuses.
Tous deux ont le même souci du devenir de l’univers et de ses fins dernières. Ils sont, sans le savoir, des « eschatologiens ».

Dans « Annie Hall » le Woody de 10 ans ne supporte pas l’idée de l’expansion de l’univers, dans « Je m’appelle… » Betty, qui a le même âge, craint la disparition du soleil.

Elle vit, avec des parents désunis, dans l’annexe administrative d’un asile pour aliénés. Ce qui lui donne des occasions d’entrapercevoir l’étrangeté d’un monde que son immaturité affective alimente en fantasmes et en peurs.

L’acteur Mathieu Carrière, lors de son passage dans la célèbre émission d’Henri Chapier « Le divan », a rappelé qu’il a passé son enfance près de la maison de fous (sic) dont son père était directeur et que cette proximité avec l’irrationnel avait certainement eu une influence sur sa façon d’entrer en contact avec les gens et avec les événements.

Betty partage bien des points communs avec le Petit Chaperon Rouge. Non seulement elle a un manteau de la même couleur, elle aime se promener dans les bois, mais encore elle porte à une aide ménagère (tendre et bourrue Yolande Moreau qui fait office de mère grand) une affection accentuée par un sentiment d’être délaissée par une sœur partie en pensionnat et une mère souvent absente.

Elle a aux pieds des chaussures vermillon qui rappellent celles de Dorothy Gale dans "The wizard of Oz" et les difficultés de cette période d’entre-deux où l’on est déchiré entre un monde que l’on doit quitter (celui de l’enfance) et un autre que l’on redoute (celui des adultes) parce qu’il est inconnu.

« Je m’appelle… », sans avoir la noire turbulence du « Tideland » de Terry Gilliam, a un petit quelque chose du conte qui hésite entre les fées et les maléfices. Tout y paraît possible et pourtant partout rode l’ombre de la mort.

Même si le film est parfois chargé de clichés, il charme par le jeu adéquat de ses acteurs , la formidable dynamique relationnelle entre Betty (*) (Alba-Gaïa Bellugi) et son père (Stephane Freiss), et une mise en scène qui rend hommage à la beauté, tantôt inquiétante, tantôt apaisante de la nature.

Et surtout il touche par la beauté d’une réplique qui, présentant les fous comme des « démunis face à la vie », insuffle à Betty le courage de quitter l’enfance, d’affronter les peurs qui s’y collaient, et de ne plus avoir besoin du confort douillet d’un diminutif. Dorénavant, elle s’appellera Elisabeth (m.c.a)

(*) qui rejoint le duo de ces excellentes jeunes actrices que sont Bertille Noël-Bruneau (« La petite chartreuse » de Jean-Pierre Denis) et Nina Kervel-Bey (« La faute à Fidel » de Julie Gavras)