Tranche de vie
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Coup de coeurINDIAN PALACE (THE BEST EXOTIC MARIGOLD HOTEL)

John Madden (GB 2012)

Judi dench, Maggie Smith, Penelope Wilton, Tom Wilkinson, Bill Nighty, Dev Patel

118 min.
4 avril 2012
INDIAN PALACE (THE BEST EXOTIC MARIGOLD HOTEL)

Old age is not so bad when you consider the alternative – Maurice Chevalier.

L’épiphanie, ce n’est pas que le 6 janvier de chaque année. C’est aussi tous ces autres moments de la vie qui sont à marquer d’une pierre blanche parce qu’ils révèlent ou rappellent des évidences oubliées.

C’est ce que vont apprendre, à leurs dépens ou pour leurs bonheurs, 5 retraités britanniques qui, le moral en berne et les poches percées, partent en Inde dans ce qu’ils croient être un palace pratiquant un rapport qualité/prix défiant toute concurrence.

A première vue, rien de bien emballant. Au contraire, un solide a priori que le film ne sacrifie à tous les poncifs d’usage sur la difficulté de vieillir, le choc des civilisations et les inévitables attractions/répulsions personnelles.

A vue plus longue que de sympathie et de séduction dans cette histoire qui, tout en n’oubliant pas que la mort, les maladies, la peur de l’avenir, les questions sur le passé - ai-je bien vécu ? ai-je suffisamment aimé ? - font partie du quotidien des aînés, choisit de ne pas s’étendre sur ce qui ne va pas.

Préférant le rose bonbon (le rose indien…) au gris de la morosité, du repli sur soi ou du désintérêt des familles occidentales pour les seniors, « Indian palace » joue la carte du tendre. Du drôle (parfois caustique). Du tonique.

Avec en atouts maîtres, des acteurs délicieux, une volonté de ne pas s’engluer dans le pathétique et une mise en scène bruyante et colorée (à l’image du pays), le réalisateur réussit à nous glisser dans l’oreille deux ou trois vérités à ne pas oublier quand viendra le temps de négocier le tournant du no man’s land entre le 3ème et le 4ème âge.

D’abord faire preuve d’humour et d’énergie. Ne jamais manquer de projet - résolutions bien plus efficaces que le botox et autres coups de bistouri.

Ensuite se mettre en paix avec son passé et les douleurs qui l’ont lézardé.

Et enfin se souvenir que « vivre est un privilège » qu’il ne faut alourdir de regrets et d’un sens du devoir trop rigide.

Le lien entre les Anglais et leur ancienne colonie a toujours été très fort. En 1968, les plus célèbres d’entre eux, les Beatles, se rendaient à Rishikesh, au bord du Gange, pour y recevoir l’enseignement du Maharishi Masheh Yogi.

44 ans plus tard, ceux qui étaient de jeunes adultes du temps de «  Let it be ... there will be an answer », reprennent la route vers l’Orient et y trouvent un autre type de réponse à leur mal-être.

Une réponse non pas tissée de méditation transcendantale mais du réconfort qu’offre un cœur quand il s’ouvre à l’inattendu et au risqué. A la tentation de la seconde chance.

Shohei Imamura dans « La ballade de Narayma » (*) proposait un autre type de voyage à son héroïne - ayant atteint 70 ans, elle devait, selon la coutume, se faire porter sur le dos de son fils au sommet de la « montagne aux chênes » et s’y laisser mourir.

S’il est vrai que le « trip to India » de John Madden est moins réussi formellement et que son propos cède volontiers à la recette des « bons sentiments », il est nettement plus dynamique et vitalisant.

Parce qu’il apporte au spectateur une élasticité zygomatique, une joie et une espérance que tant de films misérabilistes, violents, intellectualisants ou stupides s’appliquent à ignorer. (mca)

(*) adapté du bref récit de Shichuro Fukazawa paru en folio.