FRANTZ

Sélectionné et primé à la Mostra de Venise, Frantz de François Ozon est librement inspiré d’un roman et d’une pièce de Maurice Rostand, déjà adaptés en 1932 par Lubitsch dans Broken Lullaby.

Pour son 11ème long-métrage François Ozon nous plonge dans un drame de l’après-guerre 14-18. Anna (incarné par la talentueuse Paula Beer qui obtenu à Venise la Coppa Volpi de la meilleure actrice) est allemande ; Adrien (l’excellent Pierre Niney) est français. Tous deux portent les blessures et les stigmates d’une guerre fratricide. Ils ont en commun « ‘Frantz » qui n’est plus qu’un nom sur une tombe. L’histoire est dense en mystères et l’intrigue exhale les parfums du mensonge. Aussi vaut-il mieux ne pas déflorer ses tenants et ses aboutissants afin de ne point gâcher l’effet de surprise.

C’est au fil de scènes en noir et blanc que se crée l’attachement aux personnages. Au fur et à mesure que l’action se déplace (d’un petit village allemand à Paris), le suspense s’épaissit et gagne en densité. Les antagonismes français et allemand sont les tristes revers d’une même médaille : le blason peu glorieux d’un nationalisme exacerbé, terreau de la Seconde Guerre mondiale. L’arrière-fond historique n’est d’ailleurs pas sans rappeler l’âpreté et la noirceur magistrale de Ruban Blanc de Michael Haneke.

Certes, l’on pourrait reprocher au film quelques longueurs mais le chemin du deuil et de la pacification intérieure n’a-t-il point besoin de temps avant de s’engager vers une voie nouvelle ? C’est à travers le parcours d’une femme forte dont le tempérament n’est pas éloigné des héroïnes de Jeune et Jolie ou de Potiche que François Ozon nous invite à ce troublant voyage au bout de la nuit.

(Lucia)