Bulle Ogier, Sabine Azéma, Valéria Bruni-Tedeschi, Jean-Pierre Marielle
Il y a des références qui sont de bons augures. Comme des bénédictions capables de mener, d’une main légère, un film vers sa réussite.
Et dans ce domaine qu’imaginer de mieux que l’aile tutélaire et aérienne de Fred Astaire ?
Il y a des souvenirs tellement douloureux qu’on préfère ne jamais en parler. Comme des horreurs dont on redoute le surgissement. Toujours possible, toujours tapi. Là près d’un cœur incicatrisé.
Et dans ce domaine qu’imaginer de pire que l’ombre d’Auschwitz ?
C’est entre ces deux vagues, opposées et pourtant complémentaires, que Noémie Lvovsky va nous proposer de gambiller.
En compagnie de Salomon, un octogénaire qui pour garder la forme prend des cours de claquettes et souhaite continuer sa vie, une fringante quinquagénaire à ses côtés.
Salomon c’est Jean-Pierre Marielle. Un Marielle fantaisiste, roublard, bourré de charme, de douce folie et d’envie d’en découdre, encore une fois, avec les grands sentiments.
Puisqu’on doit mourir, pourquoi ne pas choisir de partir heureux ?
Salomon croque la vie avec gourmandise, étonnement devant l’image de la vieillesse que lui renvoie les autres, panache, égoïsme, drôlerie et blessures tues.
Refusant d’être chloroformé par les rhumatismes, le manque d’argent, les relations tendres et houleuses avec sa fille, la charge d’une ex-épouse zinzin, les risques de défaillance sexuelle, le poids d’être une victime survivante de la Shoah, il danse avec le quotidien.
Et lui imprime son tempo : le swing. Ce mouvement qui louvoie entre inventivité et énergie.
Pierre Mertens s’est demandé s’il était encore possible d’écrire après Auschwitz, Noémie Lvovsky lui répond qu’en tout cas il est encore possible de rire, d’aimer, et même de faire la paix avec le passé.
Si « Faut que ça danse » ne garde pas constamment le rythme, il ne manque pas de reprises (*), de surprises - dont une Sabine Azéma en pleine exubérance mammaire (botox, silicone, wonderbra ?) - de jolis rôles féminins, tantôt fragile et fêlé (Bulle Ogier) tantôt excédé et excédant (Valeria Bruni-Tedeschi ) et même d’excusables ratés dus à un entrain un peu forcé et à une gaieté trop artificielle.
Sans être à la hauteur de ses cinéastes favoris - Truffaut, Wilder et Lubitsch qui l’a inspirée dans le choix du patronyme de Salomon (Bellinsky comme le héros de « Cluny Brown ») - Noémie Lvovsky nous offre un film qui balance entre extravagance et gravité.
Un mélange foutraque de valse et de twist. Un bariolage de délire et de mélancolie qui plaira à tous ceux qui n’ont pas envie de se laisser piéger par le mirage de la carte vermeil. (m.c.a)
(*) « Il arrive un moment, où l’âge venant, le choix d’une tombe paraît plus approprié que le choix d’une maison ». Que c’est joliment vrai.