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FATWA

Mahmoud Ben Mahmoud

Ahmed Hafiane, Ghalia Benalli, Sârra Hanachi

102 min.
20 février 2019
FATWA

Un film coup de poing qui dénonce, dans une progression lente et sure, tous les effets pervers du fanatisme religieux sur les jeunes.
A ne pas rater.

Tunisie 2013.
Brahim Nadhour, (magistralement interprété par Ahmed Hafiane) un tunisien installé en France depuis son divorce, rentre à Tunis pour enterrer son fils Marouane, qui, selon les autorités, aurait été tué dans un accident de moto mortel, bien qu’aucune preuve ne puisse être présentée.
Peu à peu, Brahim découvre que Marouane militait au sein d’une organisation salafiste et décide de mener son enquête pour identifier les personnes qui l’ont endoctriné.

Le réalisateur Mahmoud Ben Mahmoud (1947), né en Tunisie, a étudié le journalisme, le cinéma et l’histoire de l’art à Bruxelles.
Il a à son actif plusieurs longs métrages de fiction et une dizaine de documentaires. « Traversées », "Poussières de diamant" (sur la communauté italienne en Tunisie), « Les siestes grenadines », « Wajd ou les mille et une voix » et » Le professeur » (portrait de la révolution tunisienne dans les années 1970) sont ses films les plus connus.

Avec "Fatwa" (6éme long métrage), Mahmoud Ben Mahmoud nous offre un film puissant – comme une démonstration- sur le thème de la fanatisation : "Mon objectif avec le film est d’exposer les aspects pervers du fanatisme auxquels le jeune Marouane a succombé", explique Mahmoud lui-même à propos du film. "Mais j’essaie aussi de zoomer sur cette autre forme d’islam, celle de l’ouverture et de la tolérance, incarnée par Brahim, et ce type d’islam paye aujourd’hui le prix fort pour la violence extrémiste".

Il y a en effet plusieurs portraits qui se croisent et s’affrontent dans ce beau film sur le thème de la radicalisation : Marouane, le fils mort si présent que l’on découvre peu à peu endoctriné, la mère, Loubna (Ghalia Benali, superbe de vérité et de force), femme libre et indépendante qui malgré les menaces continue sa lutte pour les libertés, et Brahim, le père, qui incarne l’image d’un islam positif d’un homme qui vit dans son temps.

Comme dans l’attentat, le héros part à la recherche des éléments qui lui permettront de comprendre comment sa propre femme est devenue kamikaze.
Car ce film montre que personne n’est à l’abri du fanatisme, quel que soit le milieu social. La famille du film est une famille éduquée. La manipulation décrite ici sur les jeunes montre bien que ce fanatisme se situe au niveau émotionnel, en exploitant la fragilité des jeunes, celle de Marouane résidant dans le divorce de ses parents et l’éloignement de son père.

La dernière scène du film (que je ne peux pas vous révéler) est saisissante. Aveu que le fanatisme a gagné ? Bien au contraire, cette scène a un sens pour l’histoire de la Tunisie : en 2013, deux héros de la révolution tunisienne, Belaid et Brahmi, ont été assassinés par les intégristes. Mahmoud semble nous dire « Attention, soyons vigilants et ne laissons pas le fanatisme renaitre « ici et ailleurs.

(France)