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Coup de coeurFALLEN LEAVES

Aki Kaurismäki

Alma Pöysti, Alina Tomnikov, Jussi Vatanen

81 min.
1er novembre 2023
FALLEN LEAVES

Ansa (Alma Pöysti), célibataire, vit dans un petit appartement à Helsinki. Après avoir été virée du supermarché où elle travaillait pour avoir emporté un sandwich périmé, elle sort dans un karaoké avec une amie pour se changer les idées. Elle y rencontre pour la première fois Holappa (Jussi Vatanen). Lui aussi mène une existence assez morose. Il habite avec ses compagnons de chantier dans un préfabriqué et perdra également son job pour cause d’alcoolisme. Le destin fera se rencontrer encore ces deux personnages solitaires mais la perte du numéro de téléphone ainsi que l’ignorance de leurs noms respectifs compliquent la naissance d’une potentielle histoire d’amour.

Avec Fallen Leaves, Aki Kaurismäki signe encore une fois un petit bijou, un film à la fois émouvant et drôle, poétique et mélancolique et triste et plein d’espoir. Il nous rappelle également que le cinéma peut sublimer là-même où l’on pourrait penser que c’est creux et lent. Chaque plan est riche en informations et références, à un point tel qu’il faudrait presque s’arrêter pour les analyser en détails. Le cinéaste nous rappelle son amour pour le cinéma et ses plus grands représentants au travers des références multiples comme les affiches de cinéma, les discussions autour du cinéma, l’adoption du chien qui portera bien son nom et la rencontre même au cinéma. Mais nombre de ses plans font également penser à Edward Hopper, pour son utilisation des clairs-obscurs, mais également pour les personnages qu’il peint, des hommes modernes, retranchés et seuls à l’instar de nos deux protagonistes.

Au-delà de cette histoire d’amour compliquée (mais quelle histoire d’amour ne l’est finalement pas ?), Aki Kaurismäki nous offre également une réflexion sur le temps, le temps qui passe, qui peut paraître long et qui en même temps défile. Mais aussi sur notre perception du temps. L’histoire se déroule de nos jours, la preuve la plus évidente étant les nouvelles que nous entendons régulièrement au sujet du conflit en Ukraine. Mais sans ces nouvelles, nous pourrions nous imaginer dans les années 60 ou 70, ne fût-ce que par les décors (comme la vieille radio qui transmet justement les nouvelles) ou les tenues.

Il serait également intéressant d’analyser la bande-son, qui met à l’honneur des artistes connus en Finlande. Passant de l’extradiégétique (lorsque la source sonore n’est pas visible à l’écran ni entendue par les protagonistes) à l’intradiégétique (lorsque la source sonore est visible à l’écran et entendue par les personnages), Aki Kaurismäki fait participer cette bande sonore à l’action, lui donnant une voix au sens premier du mot, car elle prend la parole là où les personnages ne savent plus que dire.

En bref, Fallen Leaves est un film de prime abord simple et court, mais l’analyse esthétique et humaine que l’on pourrait en faire ne l’est certainement pas.

(Astrid De Munter)