Occasion de réfléchir
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DEATH OF A PRESIDENT

Gabriel Range (UK 2006 - distributeur : Cinéart)

Hend Ayoub, Brian Boland, Becky Ann Baker

115 min.
18 juillet 2007
DEATH OF A PRESIDENT

Il y a quelque chose chez Gabriel Range qui fait penser à Raymond Aron. Prendre une position intellectuelle c’est s’engager.

Dans exactement 3 mois moins un jour, le 19 octobre 2007, le Président George W. Bush est assassiné, à Chicago, lors d’un bain de foule. Une enquête quelque peu expéditive mène à un suspect syrien et à une nécessité de durcir le Patriot Act 2 par le vote d’un 3 plus répressif.

A partir de ce postulat, Range va concevoir un vrai-faux documentaire censé être tourné en 2008 pour se pencher sur les événements de l’automne 2007. Il s’était déjà livré à ce genre d’exercice - qui en conjugaison relèverait du futur antérieur - dans un téléfilm coécrit avec Simon Finch (*) « The day Britain stopped ».

« Death… », dans la lignée provocatrice et subversive du « Punishment park » de son compatriote Peter Watkins, donne à croire qu’il explore l’actualité alors qu’il repose sur une hypothèse imaginaire mais qui, parce qu’elle peut être aisément connectée au réel, crée une apparence de vérité.

Pour accroire sa crédibilité, Range assoit son procédé sur un judicieux mariage entre images d’archives et de fiction. Les deux réalités (une de terrain et l’autre de studio) étant huilées par des effets informatiques aussi réussis que ceux de Forrest Gump de Robert Zemeckis dans lequel on voyait notamment Tom Hanks serrer la main de John Fitzgerald Kennedy.

Même si la prouesse technique est intéressante, le propos de Gabriel Range se situe en périphérie de la forme, aussi réussie soit-elle. Cette figure de style intelligemment maîtrisée confère une singulière force dénonciatrice à l’intention du cinéaste : démontrer combien il est aisé, pour les medias, de manipuler une vérité.

« Death… » n’est pas qu’un pseudo documentaire ou une enquête policière prenant la forme classique du « Whodunit », il est aussi une interpellation du spectateur pour lui rappeler qu’il ne doit pas se réfugier, pour fonder ses croyances, derrière ce que lui montre la télévision. De sa vigilance dépend le maintien d’une démocratie menacée, à toute occasion par un piétinement de ses libertés civiles.

Les autorités américaines semblent ne pas apprécier le propos de « Death… » assimilé hâtivement à un appel à l’assassinat politique - Hillary Clinton aurait déclaré « …I’ve never seen a movie so horrible in my life. I think it’s absolutely outrageous » (***)

Plus ouvert à la critique politique ou/et à l’auto-récompense, le dernier festival de Bruxelles, non seulement a privilégié dans sa programmation un autre « mockumentary », (**) mais il a décerné un prix à « Death… » . Celui de la RTBF, cette chaîne de télévision qui avait conçu le hoax sur l’éclatement de la Belgique….. (m.c.a)

(*) qui a, dans son porto folio télévisuel, un intéressant documentaire sur « Hitler et Staline ».

(**) « AFR » du danois Moretn Hartz Kaplers qui met en scène le meurtre fictif du véritable Premier Ministre Rasmussen par l’anarchiste imaginaire Emil
(***) http://en.wikipedia.org/wiki/Death_of_a_President