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CAGES

Olivier Masset-Depasse (France/Belgique 2006 - distributeur : Cinélibre)

Anne Coesens, Sagamore Stévenin

86 min.
9 mai 2007
CAGES

Il y a trois choses qui font d’un film une matière vivante. Son élaboration mentale par un scénariste, sa mise en images par un cinéaste et sa projection devant un public.

A chacun de ces stades, le film vibre des énergies du travail personnel de conception, de la collaboration avec d’autres pour donner forme à ce qui au départ n’est qu’une idée, et enfin des prises de positions qui atteignent leur maximum de contradictions au moment où, terminée, l’oeuvre est présentée au regard de qui veut bien la voir.

Et c’est à ce moment là, à ce moment précis où il est livré à l’avidité scopique du spectateur qu’il commence sa vie autonome et parfois malmenée.

Ainsi « Cages » qui, par les opinions diverses qu’il suscite - *** pour La Libre Belgique, ** pour Cinémaniacs, * pour « Télé-Moustique » - acquiert le statut intéressant du film pour lequel il n’y a pas d’unanimité. Et qui provoque, dès lors, une curiosité particulière : le voir pour se faire sa propre conviction.

Si « Cages » convainc, c’est moins par son histoire, celle d’une passion amoureuse, vécue par son héroïne d’une façon dangereusement exclusive et absolue (*), que par la maîtrise visuelle avec laquelle Olivier Masset suit ses personnages et les inscrit dans une série de gestes, tantôt charnels, tantôt quotidiens qui les enferment derrière les barreaux d’une vie à deux qui ne résistera pas à l’épreuve du temps et des accidents qu’elle charrie.

Olivier Masset-Depasse, déjà dans ses courts métrages « Chambre froide » et « Dans l’ombre », avait démontré sa capacité à saisir deux personnages dans l’intensité dramatique, proche du point de rupture, de leur relation. Ici encore il signe, entre Eve et Damien, un huis-clos étouffant qu’il met en parallèle avec un paysage, fait d’eau et de falaises, époustouflant d’aération.

Le film baigne dans une atmosphère de réalisme magique qui lui donne, alors que ses extérieurs ont été tournés en France sur la Côte d’Opale, une touche de belgitude qui, même si elle déroute parfois, apporte au propos une dose d’onirisme qui en allège la pression asphyxiante.

Volonté de compenser, par quelque chose de grotesque, la violence d’un corps-à-corps qui se retrouve dans le choix de n’accorder aux personnages secondaires qu’un statut d’esquisse comme pour mieux se concentrer sur la difficulté de sortir de ce que Gainsbourg appelle le sans issue de l’amour physique.

« Cages », « Je t’aime, moi non plus ». Je t’aime un peu, beaucoup. Allez le voir, pour vous arrêter sur le pétale de l’effeuillage de la marguerite, qui vous sera propre. (m.c.a)

(*) « La cage » de Pierre Granier-Deferre avec Ingrid Thulin ou encore Robert Altman dans « Images » avec Susannah York

Un entretien avec le réalisateur et ses acteurs principaux est proposé en onglet "Interviews".