Adaptation d’un livre
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BEL AMI

Declan Donnellan & Ormerod Nick (USA 2011)

Kristin Scott-Thomas, Uma Thurman, Christina Ricci, Robert Pattinson, Colm Meany

105 min.
29 février 2012
BEL AMI

S’insérant dans un mouvement qui s’empare depuis quelques mois des écrans, à savoir l’envie de porter un regard nouveau, au demeurant pas nécessairement meilleur, sur des films anciens (*), le "Bel ami" de Donnellan & Nick est, selon nos calculs, la 14ème version d’un roman de Guy Maupassant.

Roman fort décrié à sa sortie en 1886 pour sa satire d’un "certain" journalisme et de "certains" milieux politiques et mondains.

Les thèmes abordés par l’écrivain, l’arrivisme, la manipulation, la trahison, continuent aujourd’hui de faire tourner le Monde (et les têtes). 

Dommage que l’on ne retrouve pas dans cette adaptation cinématographique l’habileté, le brio, la perversion qui ont fait du livre un cynique vade mecum du "comment réussir quand on manque d’instruction mais pas d’audace".

Prosper-George Duroy est pauvre et jeune et doté d’un physique avantageux - d’où son surnom à la fois infantilisant, protecteur et méprisant.

Son savoir faire : la séduction. Son terrain d’action : le journalisme Son but : gravir les échelons de l’échelle sociale et financière.

Pour y arriver, il aura comme maîtresses (d’école de la vie) 3 femmes. D’âge et d’intelligence différents dont il se servira, indifférent au chagrin et au déshonneur qu’il peut occasionner.

« Bel Ami » est un regard critique porté sur une société (qu’elle soit du XIX ou du XXIème siècle) malade d’égoïsme et de duplicité dans laquelle on triomphe par le mensonge, l’opportunisme et l’efficacité de ses relations - aujourd’hui on dirait réseaux.

Pour incarner les personnages qui portent cette histoire forte il faut des acteurs qui sachent rendre la vénimosité des jeux amoureux et sociaux. Et là, il faut bien reconnaître que nous ne sommes pas dans « Les liaisons dangereuses » de Stephen Frears.

Robert Pattinson (l’icône de la série « Twilight ») n’est pas John Malkovitch (**), ni Uma Thurman Glen Close ni Natalia Tena Michelle Pfeiffer.

C’est plutôt dans les rôles secondaires, dans les jeux de lumière tantôt appolinienne tantôt crépusculaire et dans le contraste entre la beauté des décors et la laideur des intentions humaines que se nichent les accroches pour entraîner le spectateur dans les replis d’une noirceur vertigineuse.

« Bel Ami » est comme Don Juan et Rastignac (dont il pourrait être un mix) devenu un archétype. Une espèce de figure de style, les linguistes parlent d’antonomase, à laquelle il suffit de se référer pour que surgissent quasiment instantanément des notions aussi disparates que cruauté, prostitution, amoralité et ... succès.

On aurait aimé que le film résonne avec la même ampleur ambigüe. Il ne fait que proposer un cinéma esthétiquement décoratif auquel il manque une réelle profondeur et un regard acidulé.

Un bon gâteau n’est pas fait que de sucre. C’est la pincée de sel qui lui donne sa saveur. (mca)

(*) "Jane Eyre", "La folie Almayer", "Wurthering heights"( ce derniers film sortira en mars 2012)...

(**) ni George Sanders dans "The private affairs" d’Albert Lewin qui avait été obligé, code Hays oblige, de réserver à Bel Ami une fin misérable (à la hauteur de ses "péchés" ?) et donc de falsifier la fin du roman.