Drame sentimental
1étoile(s) 1étoile(s) 1étoile(s) 1étoile(s) 1étoile(s)

ATONEMENT ou REVIENS-MOI

Joe Wright (Grande-Bretagne 2007 - distributeur : Upi)

Keira Khnightley, Saoirse Ronan, Romola Garai, Brenda Blethyn, James McAvoy

130 min.
9 janvier 2008
ATONEMENT ou REVIENS-MOI

Aïe. Joe Wright n’est pas James Ivory (*). Ni Keira Knightley Kristin Scott-Thomas (**). Le titre français bizarrement traduit de l’anglais « Reviens-moi » donne envie de le corriger par un autre impératif : « Ne vous croyez pas obligé d’y aller ».

« Atonement » débute dans la somptuosité « soies-dentelles-château » de la noblesse anglaise d’avant la deuxième mondiale et se termine sur un plateau de télévision de nos jours.

Un go-between entre ces deux temporalités : Briony. Jeune adolescente dans les années 1930, elle devient une femme de lettres reconnue décidée à terminer sa carrière par un dernier livre dans lequel elle confesse une faute commise il y a longtemps.

Eprise et jalouse, comme on peut l’être à treize ans, de l’amoureux de sa sœur aînée, elle l’a dénoncé pour un viol qu’il n’a pas commis. Celui-ci n’échappe à la prison qu’à la condition de se porter volontaire pour partir sur le front français.

« Atonement » est comme la plaque tectonique africaine. Il se divise autour d’un riff impossible à combler : ce qui se passe avant la dénonciation et ce qui se passe après la dénonciation.

Autant la première partie est sophistiquée, romantique et d’essence lawrencienne - l’attrait physique transcende les classes sociales - autant la seconde partie est lourde, artificielle, proche des décors en cartons pâte des reconstitutions historiques d’une RTBF fauchée.

Une mise en scène peu subtile, une paresse à cerner en profondeur les personnages, une volonté manifeste (quoique ratée) de spectaculaire - on pense au long et verdâtre plan séquence de la déroute de Dunkerque - font de ce film un pâle reflet du roman d’Ian McEwan dont il s’est inspiré.

Reste la prestation de Vanesse Redgrave. Brève mais intense apparition qui rend à l’imagination la force et le souffle qui manquent au film. Cette imagination qui permet de se mettre en paix avec soi, d’expier la honte d’un passé en lui inventant la suite heureuse qu’il n’a pas connue.

Briony est la jeune Romola Garai, l’« Angel » du beau film de François Ozon. Deux rôles dans lesquels elle donne, avec conviction et déraison, corps à la part de fantasme dont est tissée la littérature.

Joe Wright (« Pride & Prejudice » en 2005 avec déjà Keira Khnightley) à sa façon, appuyée ou discrète, rend un hommage à deux de ses maîtres. Marcel Carné et la célébrissime scène du baiser dans « Quai des brumes » et Anthony Minghella (« The english patient ») qui est l’interviewer de Vanessa Redgrave.

La barbarie civilisée d’« Atonement » tient dans sa première scène : un martèlement de machine à écrire qui résonne comme des impacts de balles. Dommage qu’elle se délite très (trop) vite sous le charançon du classicisme : le maniérisme. (m.c.a)

(*) Le fastueux metteur en images des romans d’Henry James ou E.M. Forster
(**) La fascinante châtelaine de « Gosford park » de Robert Altman