Ecran total 2011
3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s)

I PUGNI IN TASCA - LES POINGS DANS LES POCHES

Marco Bellochio (Italie 1965)

Paola Pitagora, Liliana Geraci, Lou Castel, Marino Masé, Pierluigi Troglio

105 min.
5 septembre 2011
I PUGNI IN TASCA - LES POINGS DANS LES POCHES

Help Marcel Ruffio !

6 ans après “Les 400 coups” de Truffaut et 6 ans avant “Family life” de Ken Loach, Bellochio, dont c’est le premier film, rive le clou, en leur mettant les points sur les I, aux familles dysfonctionnelles.

Il le fait avec l’énergie d’un boxeur et l’originalité vénéneuse d’un esthète.

« Les poings … » sont pleins d’uppercuts qui font mal : une mère (où est le père ?) aveugle dans tous les sens du terme, un fils amoureux de sa sœur et matricide, des maladies et handicaps (héréditaires bien sûr), des mensonges, des tonnes d’hypocrisie, de la culpabilité et de la haine sans mesure.

Le grand art de ce jeune cinéaste de 25 ans est d’avoir réussi à rendre cet opéra bouffe décapant et déchirant.

Sa rage le spectateur la partage. Sa frénésie il la comprend et sa hargne à décrire l’envie de quitter, à n’importe quel prix, ce huis-clos mortifère il la ressent.

Film brûlot qui dérange et met mal à l’aise mais fait aussi réfléchir sur la folie (ontologique ou stucturelle ?) et ce qui fonde et en même temps détruit une famille. Ces liens ténébreux, étouffants qui demandent que les fenêtres et les portes restent ouvertes pour en éventer le soufre.

C’est par une mise en scène aussi radicale que son propos - aprêté des raccords parfois volontairement faux, noir et blanc saturés et élégants, fébrilité névrotique des cadres, hyperexpressivité des gros plans - que Bellochio choisit de poser une bombe sous les piliers de la société italienne de l’époque (*), l’église et la bourgeoisie.

Cinéma rongé de l’intérieur qui a scandalisé mais aussi inspiré d’autres écorchés vifs du 7ème art (Pasolini, Fassbinder et plus récemment Vinterberg "Festen", Reinhardt "Ping pong"), cinéma serré comme un expresso ristretto mais aussi cinéma qui cherche et borde.

En trouvant à ces déséquilibres une cause, un germoir : une normalité faite de codes sociaux dont tout irrespect doit être castré, flingué, dégommé.

« Les poings … » peut être vu en serrant les siens de colère, en les levant pour se défendre ou combattre.

Ou en les relâchant pour en expulser tensions & rancoeurs. (mca)

(*) celle-ci a-t-elle tellement changé depuis lors ou se contente-t-elle de continuer à s’autodétruire mais de façon différente, plus ludique. Juste assoupie par de longues heures passées devant l’ordinateur, sa mise sous perfusion en doses massives de Nutella et suspendue aux résultats de la Juventus.