Reprise
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Coup de coeurABOUT ELLY

Asghar Faradhi (Iran 2009)

Golshifteh Farahani, Taraneh Alidousti, Merila Zarei, Shahab Hosseini

116 min.
17 août 2011
ABOUT ELLY

Quelle bonne idée de la part du cinéma Vendôme en cet été de cinématographie terne et pluvieuse - des comédies qui font à peine sourire, des drames nombrilistes et des 3D violentes - de reprendre ce film, le 5ème du réalisateur iranien Asghar Fahradi, sorti sur nos écrans en avril 2010.

Film dont la revisitation souligne à quel point il est l’ébauche déjà très aboutie du chef d’œuvre « La séparation » qui a été, en ce printemps 2011, l’un des coups de cœur les plus applaudis de CinéFemme.

« About Elly » c’est moins une histoire, durant un week-end entre amis au bord de la mer Caspienne une jeune femme disparaît, que l’expression d’une tension qui très vite quitte le registre étroit du thriller pour devenir une réflexion sur la façon de fonctionner d’un groupe.

Et au-delà du groupe d’une société

Cette société iranienne saisie dans toutes les complexités qui tenteront de s’exprimer dans la révolution durement réprimée du printemps 2009. : d’une part une classe moyenne plutôt aisée, ouverte aux idées occidentales et à une libéralisation de la condition féminine et d’autre part une tradition, un machisme et une politique rétrogrades et étouffantes.

L’idée qui piège et enferme le spectateur, afin sans doute de mieux souligner l’illusoire liberté des Iraniens est à la fois simple et géniale : utiliser comme lieu d’espace narratif la pesanteur d’un huis-clos mais filmer celui-ci avec l’apparente légéreté que donne un tournage caméra à l’épaule.

« About Elly » est une tragédie, sombre et dense qui nous parle parce qu’elle rappelle avec une violente retenue et une élégance formelle que les rapports humains qu’ils soient personnels ou sociaux sont faits de mensonges et de non dits.

Toujours prompts à rompre ce qui paraissait harmonieux et même joyeux.

Magnifiquement interprété, écrit avec intelligence, tourné avec un brio dépourvu d’esbroufe, « About Elly » subjugue par sa profondeur de champ psychologique.

Il est comme la partie émergée d’un iceberg dont on soupçonne que ce que l’on ne voit pas repose sur des sentiments moins amicaux que ce qui est montré en surface : agrégats de discorde, de culpabilité et d’angoisse qui fragilisent et désunifient.

Quand ils ne tuent pas.

Asghar Fahradi a reçu l’ours d’argent pour son film au festival de Berlin 2010. (mca)