A HISTORY OF VIOLENCE

Je c’est un autre disait Rimbaud. Et si avec Cronenberg, l’autre devenait je ?

Tom Stall (un inspiré Viggo Mortensen) habite dans une petite communauté du Midwest américain. Dans ce décor à la Norman Rockwell il mène une vie banale et paisible.

Un jour pourtant cet époux et ce père de famille modèle massacre avec une sauvagerie insoupçonnée deux malfrats qui tentent de le voler. Il devient un héros et là sa vie commence à basculer.

Qui est-il vraiment ? Peut-il cumuler différentes identités et changer de personnalité au gré des situations qu’il est amené à vivre ?

Ce thème de l’ambivalence cher au réalisateur [M.Butterfky (1993), Dead Ringers (1988)] est décliné, tant au point de vue esthétique que narratif, de façon double.

La mise en scène impavide contraste avec la tension psychologique qui s’installe chez les protagonistes, l’image de quiétude dans laquelle Tom se coule est désavouée par l’ hérédité violente qu’il a transmise à son fils.

Cette histoire, si elle a une résonance particulière pour la famille Stall, s’inscrit dans une histoire plus large, celle de l’Amérique dont chacun sait qu’elle a été conçue dans le sang et les turbulences.

J’aime Cronenberg parce que c’est le cinéaste de l’intranquillité qui traque ce qui fait de l’individu un être insaisissable et incohérent. Dépositaire d’une part d’ombre qu’il ne maîtrise pas le héros cronenbergien est d’essence pascalienne : à la fois ange et démon.

Film complexe et percutant qui propose à chaque spectateur un miroir dans lequel, s’il est honnête, il peut se reconnaître avec sa part de normalité et de marginalité moins avouable. (m.c.a)